Jean Baptiste MOUSSIÈRE est né le 13 mai 1893 au lieu-dit Fayet à LAPRUGNE (ALLIER), fils naturel de Gilberte MOUSSIÈRE, sans profession.
Après l'école primaire, à 12 ans, il est parti apprenti sabotier avec la dure vie de l'époque, vivre dans les huttes construites sur les coupes de bois et de façonnage des sabots.
N° matricule 1225 au bureau de recrutement de MONTLUÇON et N° 71 au canton du MAYET DE MONTAGNE, classe 1911, il est incorporé le 28 novembre 1913 au 38ème Régiment d'Infanterie à SAINT ETIENNE, 120ème Division d'Infanterie, et participe à la guerre de 1914 dès les premiers jours.
Le 15 mars 1916, il est blessé grave à la jambe droite à VERDUN. Après plusieurs hospitalisations le 18 avril 1918 il est muté au 142ème Régiment d'Infanterie et promu 1ère classe le 27 mai 1918. De nouveau blessé en CHAMPAGNE il est évacué le 26 septembre 1918 vers divers hôpitaux. Il sera libéré le 31 juillet 1919 à sa sortie de l'hôpital militaire de VICHY. Il rejoindra alors LAPRUGNE pour y exercer le métier de sabotier.
Le 13 novembre 1919 à LAPRUGNE, il épouse GONNARD Marie Angèle née le 31 décembre 1898 à LAPRUGNE au hameau du Point du Jour, fille de Antoine GONNARD, sabotier, et de Marie Gilberte ROCHE sans profession.
En mars 1921, le couple vient s'installer à MONÉTAY SUR ALLIER dans la maison COLAS au bourg, anciennement la quincaillerie POUGNÉ, à l'origine café BUVAT aubergiste comme l'atteste les inscriptions sur les murs nord et est. Jean Baptiste MOUSSIÈRE a pris la relève de Pierre BERAUD, sabotier au bourg face au porche de l'église, décédé le 24 juin 1920 à l'âge de 52 ans, son épouse était épicière.
Lors de leur installation dans la maison COLAS, la rue passait entre la maison et le puits communal qui avait été recouvert d'une pompe à godets. Il alimentait une partie du bourg et même sa périphérie en cas de sécheresse lorsque les autres points d'eau étaient taris.

Maison COLAS anciennement la quincaillerie POUGNÉ.
Le puits à l'avant.
Dès son installation Jean Baptiste MOUSSIÈRE a construit une cabane atelier en bois, couverte en tuiles avec chauffage permettant de travailler l'hiver, la porte vitrée donnant sur la maison et la rue, et la fenêtre sur la bascule. Le dépôt de bois professionnel ainsi que les fagotiers se trouvaient à la suite de la cabane à l'emplacement du chemin actuel qui a été percé dans le talus.
Le sabotier tronçonnait seul son bois de travail à l'aide d'un passe-partout surmonté d'un grand arc en bois permettant de tenir la scie tendue et droite.
Le 12 mars 1924, naissait Fernande Isabelle, fille unique qui fut la joie du foyer.
Le 24 juillet 1945 à MONÉTAY elle épousera Ernest Edmond MARTIN, instituteur.
L'atelier était d'une grande propreté et les outils soigneusement rangés: herminettes, haches à fendre et à abattre de divers modèles, gouges et cuillères à creuser les sabots, tarières, paroirs, rainettes, boutoirs, planes, râpes, scies, racloirs, rabots, le tout aligné aux murs de la cabane par tailles et par séries, ainsi que les garnitures en cuir pour les sabots de travail ou fantaisies appelés demi-garnit ornés pour les femmes de fleurs sculptées. Les vieux portaient des sabots tout en bois. Les outils principaux étaient le grand rabot dit la colombe, le banc d'âne appelé vulgairement le bourri, et le gros établi avec sa boucle pour le paroir et ses différents trous servant à mettre les cales suivant les pointures des sabots. L'outil qui frappait le plus était le jeu de mesures bois donnant la pointure en pouce et demi-pouce.
Voici quelques outils de sabotier.
Cliquez sur le nom de l'outil pour en afficher sa photo.
Boutoir | Cuillère | Hache |
Herminette | Paroir | Plane |
Racloir | Rainette | Tarière |
Jean Baptiste MOUSSIÈRE travaillait à l'oeil et ne se trompait jamais pour les pointures recherchées. Quand les sabots étaient terminés ils étaient pendus par séries, noircis ou vernis et par pointures dans le sous-sol de la maison qui servait de magasin de vente.
Son jardin à l'arrière de la maison, ainsi que le champ attenant étaient entretenus de façon exemplaire afin de subvenir en légumes pour la famille

A haut à gauche café LALOIRE devenu MESTRAU.
Au centre le dépot de bois et la cabane.
Au milieu de la rue la famille POLOGNE:
A gauche: Emma, au centre: Valentine et Zette, et à l'arrière: Suzanne.
Sa principale distraction était la pêche qu'il pratiquait dans la Mouille en compagnie de ses voisins Charles BRUSSY et Abel BARRET. A cette époque, la Mouille était un véritable vivier qui nourrissait une partie du bourg. Son seul moment de détente était les parties de cartes au café MESTRAU le dimanche après-midi.
Tous les jours et même plusieurs fois par jour, sa patience était mise à l'épreuve par la visite de la pauvre Emma POLOGNE qui venait chercher de l'eau au puits et faisait le tour de tous les voisins.
Après la seconde guerre, les jeunes ont délaissé les sabots pour des chaussures plus modernes et plus agréables à porter, seuls les anciens ont porté des sabots jusqu'à leur mort. La saboterie a décliné doucement tout comme les sabotiers.
Le 6 mars 1964, Marie Angèle MOUSSIÈRE s'est éteinte à l'âge de 65 ans, son mari Jean Baptiste est également décédé le 20 décembre 1971 à l'âge de 78 ans. La maison MOUSSIÈRE a fermé ses portes et leur fille Fernande MOUSSIÈRE MARTIN a légué tout le matériel de saboterie au Musée Charles Louis PHILIPPE de CERILLY en mémoire du père de l'écrivain qui était sabotier.

Aujourd'hui, rares sont les personnes qui ont connu la famille MOUSSIÈRE et seuls le nouveau chemin dans le talus près de la croix du bourg et la cour devant les maisons communales porte le titre de Cour du Sabotier en souvenir de cette brave famille.
Monsieur Yves MARTIN le petit fils de Jean Baptiste MOUSSIÈRE
Monsieur Paul BURLAUD